Brys est apparue dans ma vie suite à la perte de Eugy, mon « coup de coeur-92 », décédée en 2007. Abasourdie par le chagrin, j’ai été obsédée par une chose : trouver, le plus vite possible la même… mêmes origines, même expression, même couleur…
Après plusieurs heures de recherches, je suis tombée sur une femelle de 4 mois qui répondait à tous mes critères, issue d’un bon élevage que je connaissais. Elle avait un prénom : Brigantina. L’élevage se situait en Russie. La vie a fait que je n’ai pas pu aller la chercher avant qu’elle ait eu 7 mois.
L’arrivée de Brys dans notre maison était une catastrophe. Peu socialisée, habituée plus aux chiens qu’aux humains, Brys se cachait la journée et hurlait la nuit, elle refusait de dormir seule. Elle avait peur des humains. Après 1 mois de souffrances, je l’ai montrée à un comportementaliste qui m’a dit que je ne pourrais jamais récupérer ce qui a été perdu. Sa sociabilité. Ainsi, grâce à Brys, j’ai commencé à étudier assidûment les troubles de comportement de chiens, et surtout à chercher des solutions. J’ai lu énormément de sources : livres, articles, thèses, en anglais, en français, en russe… je me suis dit que je n’avais aucun droit de la laisser tomber.
Une année plus tard Brys a gagné sa classe au Championnat de France. Afin de la socialiser, on la sortait partout : aux restos, chez les copains, en ville, n’importe où… en plus, elle ne pouvait pas rester seule, elle hurlait. Quand j’ai décidé de m’orienter vers la médiation animale, Brys avait 5 ans. Pour moi, elle n’était pas capable d’intervenir auprès des personnes fragiles, elle était fragile elle-même, toujours à fleur de peau, trop attachée à moi, instable, imprévisible.
J’ai adopté Lana pour ce projet. En même temps, Brys a perdu l’audition, puis elle est tombée en dépression : je m’occupais beaucoup de Lana, je partais souvent avec elle. Quand j’ai pris conscience de l’état de Brys, j’ai commencé à nouveau à chercher des solutions pour la sortir de sa souffrance dont la cause principale était mon propre comportement et mon nouveau projet. Lana avait aussi ses propres problèmes, et, en cherchant un spécialiste pour mes deux chiennes, j’ai rencontré Emmanuelle Titeux, docteur vétérinaire, exerçant en médecine du comportement.
Emmanuelle nous a reçu très rapidement, j’ai d’abord ramené en consultation Brys, et, ensuite, Lana. « Mais qu’est-ce qui vous empêche, – m’a dit Emmanuelle, – de prendre Brys avec vous en atelier …? ». J’ai réfléchi. Rien. Absolument rien. Au pire, elle sera attachée à une table. Ce premier atelier je n’oublierai jamais. Sa joie, son expression de bonheur absolu d’être avec nous, de participer, de voir un environnement nouveau et accueillant. Brys était tellement emballée qu’elle était presque ingérable.
Très rapidement, elle s’est habituée et a commencé à « travailler » : rapporter des objets et rester calmement sur les genoux des résidents… elle a appris énormément de choses en l’espace de quelques mois : comment s’approcher, comment se placer pour qu’on puisse la toucher, la caresser, attendre que la personne prenne un objet de sa gueule. Etant très active, Brys ne s’arrêtait jamais, même derrière mon dos elle allait voir s’il y avait quelque chose à voler chez les cochons d’Inde : des carottes, des feuilles de salade … elle faisait rire tout le monde. Sa longue queue ne s’arrêtait jamais de battre. Elle faisait aussi des bruits marrants : « On dirait qu’elle parle ! » – j’ai souvent entendu cette phrase. « Elle est sourde comme moi! Et elle est contente! » – « Oui, Madame, elle se moque de ce que je lui dis ! C’est un avantage, n’est-ce pas …? ». « Quelle joie de vivre ! On ne dirait pas qu’elle est handicapée ! »… ces phrases sont devenues récurrentes.
Grâce à Brys, Lana, trop sensible aux bruits, avait le temps nécessaire pour s’habituer, se désensibiliser. Brys pouvait travailler toute seule pendant une heure, ça ne la dérangeait pas. Elle est devenue médiatrice parfaite, très expressive, presque « théâtrale », elle m’a donné beaucoup d’idées d’activités à visée thérapeutiques : travailler avec des sons, des objets… sa palette de comportements était inépuisable.
Aujourd’hui, Brys est à la retraite, elle a eu 11 ans en février 2018. Le travail lui manque, c’est certain. Pour l’occuper, je lui ai appris à peindre : avec elle tout est facile. Elle est très contente quand je la sors dans des endroits où il y a beaucoup de monde. On dirait que plus il y a de monde autour d’elle, plus elle est contente…